EXTRAIT
Q : Maria, où as-tu grandi ?
Maria : Je suis né à San Isidro dans
la forêt, avec des montagnes, des cascades. Je me rappelle que mon père nous amenait à la cascade pour une quête de visions, au
pied du (volcan) Sangay. Quel froid ! Comme il était guerrier, lui aussi buvait la médecine
(ayahuasca), il était chaman, uwishin (dans notre langue), un des meilleurs. Mon père était de Mendez et ma mère de Gualaquiza. Il était tant guerrier qu’il avait reçu une femme à 11 ans, elle-ci
avait quelques années de moins. A cause des ennemis, mon père est parti loin avec sa femme chez un membre de sa famille à Macas. A cette époque, il y avait seulement 4 petites maisons à Macas
(20.000 hab. aujourd’hui). De Gualaquiza, ils ont dû marcher un mois pour arriver à Macas. Ils ont cherché un terrain un peu plus loin dans la forêt, il n’y avait qu’une maison, celle d’un
cousin. Mon père a eu 7 enfants. Ma
mère s’est occupée des enfants qui se sont mariés et San Isidro est devenu un village.
Quand j’ai eu 8 ans, je suis partie
à l’internat à Sucua. Dans une mission salésienne, jusqu'à l’âge de 13 ans. Ensuite, j’ai passé 2 ans à Macas. Comme à cette
époque, il était coutume de donner les jeunes filles mineures en mariage, mes parents m’ont donné à un gendre qui était
veuf, mais qui avait été si bon qu’il était devenu comme un neveu pour mon père.Mon mari était d’un autre endroit, de Makuma, cette région que vous voyez. Cela fait 40 ans que je vis ici et j’ai eu 10 enfants.
Q : Finalement, Jessica, ta dernière fille est né ?
Maria :A 40 ans, à cet âge où les docteurs me disaient que je ne pourrai plus avoir d’enfants, j’ai eu Jessica, ma dernière fille. Normalement. A partir de là, en remerciant les visions que j’ai eu avec la médecine,j’ai mis ma foi, je me suis mise à agir et réaliser ce rêve. Et maintenant je suis guérisseuse.
Q : Que se passe t'il quand tu prends l'Ayahuasca ?
Maria : Et quand j’ai pris l’ayahuasca, je suis partie dans les étoiles. Le maître m’a dit : « lorsque tu arrives au fond de l’univers ou au fond des lagunes,ne te sens pas perdue, sois tranquille, restes assise et voyage, montes, descends, visites. Ce sont des endroits immenses… sans fin. Que c’est beau dans les étoiles ! J’ai rencontré une femme des étoiles, Yaanua. C’est une très belle femme, souriante, lumineuse qui va partout.Qu’est-ce qu’elle chante bien ! On se soigne (avec ces chants). Elles disent qu’elles vivent dans un paradispour rendre heureux le père créateur, la lune et les étoiles. Que c’était beau ! Nous autres disons pañar, ces chants magiques qui sont maintenant gravés en moi.Cette vision n’est pas de cette réalité. Je me suis mise à penser et à méditer je suis partie au fond de l’eau. Là-bas aussi il y a de beaux chants. Les êtes Tsunki m’ont fait écouter ces chants. Lorsqu’on les chante à quelqu’un de malade, ils se retrouvent comme pris par la médecine.
Q : Est ce que l'effet est réel lorsque tu prends la médecine ?
Maria : C'est réel. je l'ai vu. Quand quelqu'un prend la médecine, pas toutes les fois, l'effet de la médecine peut te faire sortir d'un problème ou d'une maladie. Qu’elle chante bien la Terre-mère, nunkui ! Quand j’avais 6 ans, ma mère m’emmenait au jardin et me disait (que ce serait beau de l’avoir enregistré à cette époque) : « ne sois pas envieuse, ne voles pas, sois travailleuse ».Et nous enfants, nous disions : « que c’est dur pour remuer la terre et sortir la patate douce ou le manioc ! ».Elle répondait : « non, on doit chanter pour ramollir la terre ».Pour arriver à faire cela, j’ai dû attendre mes 17 ans. 17 ans !Lorsque je me suis mariée, la terre était enfin meuble (par mes chants).Il n’y avait qu’une seule maison ici et ce grand jardin immense, imagines-toi tout le travail.Et tout jusqu’ici, toutes les visions que j’ai eu sont réelles. Je prie avec mes médecines. Je souhaiterai que tous les gens, tous ceux qui viennent partager la médecine,ne pensent pas que ce sont de simples images, de l’imagination, mais qu’elles sont réelles,des personnes vivantes qui se connectent aux astres et à la terre. Des êtres vivants. Les êtres des montagnes, les êtres de la cascade vivante sont des êtres bien sûrs et réels.