EXTRAIT
Q : As-tu grandi en ville ou à la campagne et as-tu rencontré la spiritualité amérindienne dès ton enfance ?
Loumitéa : Je suis né à Montréal, mais dès mon enfance, j’ai passé tous mes étés à la campagne. Dans les lieux où sont mes racines, du côté de ma grand-mère, mes racines Algonquiennes. Après cela, on a passé nos étés à St Placide près du lac des deux montagnes. Là on était près de la réserve des Moraks. J’allais souvent avec un ami les visiter et participer à toutes sortes de cérémonies. C’est comme cela que j’ai commencé à être initié à la spiritualité amérindienne. Quand j’étais petite, je voyais souvent des personnes décédées. Au bout de lit, à la maison, à différents endroits... Je ne faisais pas la différence, enfant, avec cette réalité là et la réalité ordinaire. Ma mère était paniquée. Parfois le soir, je ne voulais pas me coucher parce qu’il y avait des gens dans ma chambre. J’ai toujours senti, mais à un moment donné, j’ai demandé à ne plus les voir. Mais je les sentais quand même. Adolescente, j’en avais peur, car j’avais fermé cette porte là. Personne ne m’avait éduqué dans ce domaine là. Mais, j’ai toujours été près de la nature. Les éléments de la nature m’ont toujours accompagné. J’aimais beaucoup les arbres. Je les observais beaucoup. J’étais vraiment une enfant dans la lune. Mais j’étais pas dans la lune, j’étais sur la terre. Mais je n’étais pas préoccupée par ce qu’on aurait voulu que je sois préoccupé.
Q : Quel est ton parcours et ta rencontre avec le chamanisme ?
Loumitéa : A l’adolescence, j’avais laissé la culture amérindienne. J’étais plus dans une recherche continuelle de spiritualité. J’ai cherché à travers les philosophies, les différentes religions. Il y avait le bouddhisme que j’aimais beaucoup. Cette approche plus philosophique que systématique. Mais il y avait toujours la hiérarchie, l’histoire du maître. A un moment donné, je suis tombé sur le livre de Mickael Harner. J’ai commencé à le lire et ça m’a tout de suite rappelé des expériences que j’avais vécu dans des rêves où dans des états de demi-sommeil. Avec mon conjoint, on a appris qu’il y avait le premier atelier bilingue de Harner à Montréal. On y est allé. Ça a été pour moi comme le retour à la maison. Les esprits, les voyages. J’avais très peur au début de faire le voyage chamanique. J’avais peur de n’être pas capable de revenir. J’ai toujours eu peur de l a folie. Comme pour moi, ces mondes-là avaient été associés à la folie, c’était très difficile d’y aller. Mais l’approche de Harner, très sécuritaire, le battement de retour lors du voyage. On est sûr que l’on va revenir. Je m’y suis risquée.
Q : Comment as-tu ressenti les premiers voyages chamaniques et comment peux-tu les décrire ?
Loumitéa : Dans l’atelier d’introduction de M. Harner, mon premier voyage, j’ai su tout de suite que c’était l’état du voyage. Je connaissais. Au début, j’avais pas beaucoup d’images. C’était plutôt sombre. Mais j’avais des impressions très claires. Je savais ce qui se passait et qui était là. Ces perceptions-là n’étaient pas dans le domaine visuel, mais dans le clair-senti ou la clair audience. J’en ai vraiment fais tout de suite beaucoup car je me suis retrouvé comme à la maison dans les voyages avec les esprits. J’avais enfin rencontré des alliés qui pouvait répondre aux grands besoins que j’avais. Les voyages sont devenus de plus en plus clair avec le temps. Au bout de 4,5 ans, les voyages étaient très clairs, pas spécialement visuels, mais très clairs. JE pouvais décrire dans le détail les choses que je percevais. Les messages étaient aussi de plus en plus clairs et l’interprétation que je pouvais en faire. Si je rencontrais un animal de pouvoir et que l’on parcourait un paysage, j’arrivais à savoir pourquoi on faisait ça. Ma relation avec les alliés dans le voyage s’est précisée. Mais dès le début. Je ne dis pas que c’était facile, car mes peurs de partir me retenaient. Mais une fois que j’ai lâché prise sur ces peurs de ne pas revenir, de voir des choses que je ne voulais pas voir. Mais lorsque j’ai rencontré mes premiers alliés, ça a été très fort. J’obtenais des réponses pour les autres très véridiques et très à propos. Donc rapidement, j’ai pris confiance car je faisais des voyages pour mes amis, les amis de mes amis... Je voulais faire des voyages pour tout le monde. On avait appris une technique de guérison et je la pratiquais avec tout le monde. J’obtenais des réponses avec les gens que je ne connaissais pas. Ils étaient frappés par les réponses, touchés par le travail de guérison. Ça a rapidement augmenté ma confiance dans les alliés et dans le voyage chamanique qui peut servir pour la divination, la guérison, prévenir, comprendre.
Q : Dans un voyage, comment fait-on la part entre l’imaginaire et le ressenti ? Qu’est ce que le ressenti pour toi ?
Loumitéa : C’est clair que c’est l’imaginaire qui supporte le voyage, qui lui donne une forme. Parce que l’information vient d’une source qui n’a pas de forme. Le grand esprit, les esprits qui prennent des formes dans mon esprit pour me passer l’information, le pouvoir, n’ont pas de forme. C’est en dehors de tout ce que l’on peut imaginer. Mais l’imagination va travailler pour donner une forme à tout cela. Quand je fais mes voyages, ça vire dans ma symbolique à moi. Je le sais, mais parfois j’ai tellement des surprises dans mes voyages que je me dis : « je ne peux pas avoir imaginé ça pour rien ». C’est comme les rêves, je les imagine. L’esprit insuffle quelque chose. Au début, c’est dur de faire confiance à ce que l’on obtient. C’est vraiment en travaillant pour les autres.
Q : A t’on le sentiment dans le ressenti que c’est vrai ?
Loumitéa : On le sait. Quand on est dans le voyage, on sait quand on est vraiment dedans ou distrait. Ça m’est arrivé surtout dans le passé car je faisais des voyages tout le temps sans tenir compte de ma forme. Ça m’arrivait de me mettre à penser : « est ce que j’ai fermé la porte ? » Il faut resté centré sur l’intention du voyage, le sujet du voyage, la question qui était posé au départ. La confiance que j’ai en travaillant avec les voyages, je l’ai développé en travaillant pour les autres. Quand tu poses une question pour toi même, tu es lié émotionnellement à la réponse. Parfois les émotions peuvent t’empêcher de percevoir des informations qui sont dans le voyage. Pour les autres, ce n’est pas le cas. Du coup, tu t’habitues à savoir comment tes alliés communiquent avec toi et comment tu reçois l’information de leur part, comment tu rentres en pouvoir, te fusionner avec le pouvoir d’un allié pour le passer à quelqu’un qui en a besoin. Chaque allié à sa façon, son attitude. Avec la pratique, on s’aperçoit que celui-là va venir pour tel problème, celui-ci pour tel autre.